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Karadriel -
Melekin
nous aiderait donc, songeais-je tout en jouant avec l'anneau de l'homme
en noir. Kells, pourquoi cette bague ? Avait-elle des pouvoirs que j'étais
incapable alors de découvrir ? J'aurais voulu avoir l'Aiguillier et ses
lignes de force pour la sonder. A défaut, il me restait toujours la Marelle.
Je fermais donc les yeux et fixais mon attention sur le Tracé bleuté qui
…. ne pleure pas fiston, j'arrive. Comment Karadriel pouvait-il douter
de ta santé mon fils, avec un tel appétit ! Je recouchais Holwin après
qu'il eut fini de téter et me rhabillais.
Il s'était endormi et je décidais d'aller chercher de quoi contenter mon
estomac. Je traversais donc le laboratoire de Karadriel : j'évitais de
poser les yeux sur ces drôles de machines qui m'inspiraient des sentiments
si….. troublants ? contradictoires ? Quelque soit le terme juste, je m'éloignais
le plus rapidement possible de cette partie de la salle. Je parvins à
une pièce aux dimensions plus restreintes. Comme je le pensais, Karadriel
vivait dans son labo. Il y avait là un lit de camp, quelques ustensiles
de cuisine, un frigidaire… plein ! Je me composais donc un sandwich et
décidais d'en faire un pour Karadriel également : si je ne le trouvais
pas, j'avais de toute façon assez d'appétit pour deux. J'embarquais également
un litre de jus de fruit et retournais dans le laboratoire.
Karadriel se tenait debout près de la grande baie vitrée. Je ne saurais
dire s'il était réellement occupé à une quelconque manipulation ou s'il
observait Holwin. " Tu veux un sandwich ?" Décidément, je ne savais toujours
pas comment me comporter avec Karadriel, je ne trouvais pas les mots.
Me reprocherait-il de m'être servie ou me remercierait-il d'avoir pensé
à lui ?
Il accepta sans dire un mot. Il semblait aussi gêné que moi. Je m'assis
pour finir mon repas. J'avais envie de lui parler, de lui exprimer ma
reconnaissance. Karadriel posa ses tubes à essais et vint prendre place
à côté de moi. Lui aussi semblait désireux de discuter. La scène devait
être du plus grand comique pour tout observateur extérieur : assis tous
les deux en train de mâcher, avec visiblement la volonté de s'exprimer,
mais de grandes difficultés pour débuter la conversation !
Nous y parvînmes finalement quand le silence fut devenu par trop pesant,
presque gênant… Karadriel accepta d'être le parrain d'Holwin, il me le
proposa d'ailleurs de lui-même. J'en étais heureuse, heureuse également
qu'il ait pris l'initiative de la conversation. Sa compagnie m'était agréable
et je ne voulais pas me retrouver seule. Assise à côté de Karadriel, mon
fils reposant face à moi et toutes ces étranges machines derrière, je
me sentais curieusement sereine.
Karadriel parlait. Il racontait pourquoi il aidait Brand, ce qu'il faisait
réellement ici. Il avait créé une armée de créatures redoutables qui pouvait
sortir instantanément de l'Abysse. Tout en l'écoutant, je ne pouvais m'empêcher
de me demander s'il aurait raconté tout cela à quelqu'un d'autre. " Et
il n'y a qu'un seul moyen de les tuer. Je ne devrais pas te le dire mais…
non, je n'ai pas le droit…" La tête dans les mains, il semblait en proie
à une grande agitation intérieure. Bien sûr, j'aurais voulu savoir comment
éliminer ces créatures, mais je ne voulais pas lui forcer la main. Je
sentais que je pouvais le lui faire dire, mais je ne voulais pas lui mentir
sur mes sentiments. Et surtout, j'avais été tant de fois forcée à agir
contre ma volonté que je ne lui imposerais pas un semblable traitement.
Je restai donc assise, attendant qu'il ait choisit seul.
Après quelques instants, il se leva et déclara : " Le mieux c'est encore
que tu les voies".
Je
suivis donc Karadriel. Nous sortîmes du laboratoire par une petite échelle
et arrivâmes dans la poche d'Ombre où nous avions poursuivi Oberon. A
peine arrivée, je vis s'ouvrir l'Abysse à quelques mètres de mes pieds
: une créature indescriptible en sortit. Elle ressemblait trait pour trait
à la peluche qu'avait offerte Karadriel à son filleul. En plus effrayant
bien sûr.
"_ J'aimerais que tu te battes contre elle , m'expliqua-t-il
_ Oh non, j'ai perdu d'avance, tu devrais
le savoir. Robin aurait une chance, pas moi."
Je fus profondément touchée par ce que me répondit alors Karadriel : il
me dit que je devais avoir plus confiance en moi, que tous nous avions
de grandes capacités mais que faute d'y croire, nous ne les utilisions
pas. Et il semblait sincère: je ne lisais pas sur son visage le sourire
narquois que j'aurais pu observer sur celui de Caine par exemple. Bien
sûr, il savait peut-être qu'en parlant ainsi, il toucherait juste, mais
je refusais maintenant de le soupçonner ainsi.
Je dégainais donc. Je ne voyais vraiment pas par où attaquer. Finalement,
je choisis de me lancer. Esquive, tentative de coup, esquive,…, finalement,
je saisis l'excroissance qui tentait de m'atteindre.
" STOP ! ! ! ! ! ! "
Pardon ? Et donc Karadriel m'expliqua qu'il avait donné des ordres à la
créature, sans lesquels, j'aurais déjà perdu mes bras. Leur "peau" sécrétait
en effet une sorte d'acide. Nous reprîmes le combat. Et comme prévu, je
perdis, mais plus tard que je ne l'aurais imaginé. La bête m'avait enduite
d'une sorte de substance poisseuse, et je rêvais d'une bonne douche. Je
me tournais donc vers Karadriel.
Il s'avançait vers moi, souriant. J'en déduisis qu'il était satisfait
mais pourquoi ? Car sa bestiole avait gagné ? Non, je le lui avais annoncé.
Car j'avais tenu plus longtemps que je le pensais ? Peut-être. Quelqu'en
soit la raison, je venais pour la deuxième fois d'apercevoir un sourire
sur ses lèvres. Peut-être devenait-il moins sombre. Il me tendit une serviette
et je m'essuyais le visage. Etaient-ce ses doigts ou les miens qui s'étaient
par trop attardés sur le tissu ?
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