- Conclusion -

     Après l'Aiguillier de la maison Hendrake, j'eus pour mission de m'emparer de celui des Chesby. Oberon m'indiqua que l'occasion se présenterait lors d'une grande cérémonie donnée en l'honneur du maître de celle-ci, Ssyba de Chesby. Quelques heures plus tard, j'évoluais donc parmi le gotha chaosien, rendu curieux par la défaite du Duc Borel.
Tout le temps que dura notre attente dans la longue file des invités patientant pour être présentés, Oberon se montra un parfait cavalier. Mais lorsque après quelques politesses échangées, le prince de Chesby s'intéressa plus particulièrement à ma personne, je l'entendis avec horreur expliquer que Ssyba aurait tout loisir de satisfaire plus tard sa curiosité, puisqu'il avait le plaisir de lui offrir cette nuit avec moi…je manquai de m'en étrangler et luttai fortement contre l'envie de faire subir le même sort à Oberon.
La soirée passa malgré tout en danses et politesses, jusqu'au moment où Ssyba se retira, m'entraînant à sa suite. Bien que tendue à l'évocation de la tournure que pourrait prendre cette soirée, je découvris en lui un interlocuteur agréable. Le contact froid du métal de son Aiguillier lorsqu'il prit ma main me ramena à la véritable raison, aux véritables raisons, de ma présence dans ses appartements privés. Je me dérobai encore et encore, déployant des trésors d'imagination pour ne pas le froisser. Mais le temps passant et l'alcool aidant, Ssyba devenait toujours plus entreprenant, jusqu'au moment où je n'eus plus d'autres recours que de choisir entre son intégrité et la mienne. Je profitai donc de la main possessive qui me retenait la taille pour m'enfoncer dans son esprit sans faire de détail. Il gît bientôt au sol, inconscient. Je m'emparai de l'Aiguillier et me téléportai aussitôt vers la maison Barimen.

     A peine avais-je remis l'anneau à Dworkin que le cours des évènements s'accéléra. Une licorne, La Licorne, apparut dans le ciel gris de la maison Barimen. Suspendu à sa corne, une pierre familière scintillait. Dworkin s'en empara, et sans plus attendre entreprit de parachever son œuvre, pendant que ses descendants prenaient des places qui leurs avaient apparemment été attribuées au préalable. Poussée par Oberon, je m'engageai, sans trop réfléchir, à la suite de Dworkin sur le Tracé en formation. Tracé inerte encore, comme je m'en fis la réflexion après quelques pas. Le bruit métallique caractéristique d'une épée tirée de son fourreau me fit me retourner. Oberon, engagé comme moi sur cette Marelle, venait de dégainer. De gris, le ciel était maintenant d'un noir angoissant. Disposés en un vaste cercle autour de nous, les gardes Barimen, menés par Melekin et Bleys, affermissaient des mains tremblantes sur les armes qui devraient protéger nos vies. Un vent infernal et impossible soufflait, contenant la Marelle naissante et ses défenseurs, mais insuffisant pour bloquer l'avancée des troupes du Chaos. Puis tout ne fut plus que heurts et cris. Devant moi, Dworkin avançait calmement, insensible ou inconscient. Je devinais à ma suite Oberon, Osric, Finndo et le petit Benedict. A chaque pas maintenant, l'Empreinte de la Marelle reprenait un peu plus de réalité dans mon esprit. Nous étions presque au centre, un dernier pas…et je sombrais dans l'inconscience.